Études historiques et figures alsaciennes

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dire trente ans après l'événement. L'impression générale qui s’en dégage, c’est une horreur instinctive de la guerre, qui est encore augmentée par les déceptions et les amertumes d'une retraite désastreuse. La guerre, pour le diplomate, est un jeu de théâtre, une intrigue dont il tient ou croit tenir les fils. Pour le général, c’ést le chemin de la fortune. Pour le soldat, c’est la souffrance et la mort sans gloire. Pour le moraliste, ajoute Gæthe, c'est une dégradation de la nature humaine. Au lendemain de la reddition de Verdun, il écrit : « Nous vivions ainsi au jour le jour, entre‘ l’ordre et le désordre, occupés tour à tour à conserver ou à détruire, tantôt pillant,

* tantôt payant, et c’est sans doute pour cela

lorsqu'on veut bien considérer que nôus avons aujourd’hui sur Gœthe deux sources de renseignements, indépendantes l’une de l’autre, et dont chacune est complète en son genre : d’un côté, la Correspondance qu'Edmond Scherer ne pouvait connaître qu'imparfaitement, et qui ne forme pas moins de cinquante volumes dans la grande édition de Weimar : et, de l’autre, l’ensemble des écrits autobiographiques, souvenirs, réflexions et délassements de la vieillesse. La Correspondance nous donne l'écho direct et immédiat de l'événement, les Mémoires, l'impression qui en est restée dans l’âme du poëte, et que le cours des années a müûrie et quelquefois changée.