Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...
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à qui que ce soit; comptez sur ma parole. » On se demande pour quels motifs Butré cachait à ses concitoyens le lieu de sa résidence actuelle! Nous ignorons d’ailleurs ce que Butré décida finalement à l’égard de l’immeuble en question. Une lettre qui dut lui faire plus de plaisir fut celle d’un baron franconien, M. de Wechmar, qu'il avait connu à Carlsruhe et qui, revenu à Anspach, sa patrie, avait fait traduire en allemand la brochure de notre économiste sur la boulangerie. Il s’empresse d'annoncer le fait « à l’honnête et galant homme, que ses talents, lumière et connaissances rendent si utile et si respectable au public ». Il ajoute : « Si je peux parvenir à vaincre les préjugés et réformer les anciennes habitudes, ce travail éternisera votre mémoire dans nos annales.” » De telles flatteries seront toujours douces, même aux philosophes, mais il faut bien croire que l’honnête baron ne s’entendait pas à « vaincre les préjugés » des bonnes gens d’Anspach, car le nom de Butré ne s’est pas plus « éternisé » dans les annales de ce petit pays qu'autre part.
Le marquis de Mirabeau, lui aussi, ne lui envoie que de tristes nouvelles pour clore sa correspondance de l’année 1778? : « J’apprends avec une véritable satisfaction, mon cher monsieur, que rien ne vous rebute de la continuation de votre travail. Lui seul est le soutien de notre vie, je l’ai éprouvé au milieu de toutes les tribulations d’une vie fort pénible et je éprouve plus que jamais cette année, où je croyais que les grandes tribulations me laisseraient quelque calme..... Mes fermiers de Mirabeau m'ont tout à coup fait
! Lettre de Benardeau, Tours, 22 juin 1778. Encore cette lettre ne porte-t-elle pas l’adresse de Butré à Carlsruhe, maïs est adressée à « M. de Butré, chez M. de Rochebrune, à Kell ». Butré aurait-il eu des créanciers à Tours, auxquels il voulait faire perdre sa trace? Vivant dans la familiarité d’un prince, il n’était guère possible, pourtant, de se céler de la sorte.
? Lettre du baron de Wechmar. Anspach, 23 septembre 1778.
* Lettre du marquis de Mirabeau, du Bignon, 6 décembre 1778.