Colonies pendant la Révolution : la constituante et la réforme coloniale

LES PRÉCÉDENTS DU DÉCRET DU 145 MAI 243

députés coloniaux et les colons de l'hôtel Massiac, pour rompre le courant de sympathie qui semblait se manifester eurent recours à deux moyens différents. Ils firent faire d’abord une diversion par les noirs affranchis. Ceux-ci vinrent, le 28 novembre, réclamer une représentation, s'il en était accordé aux mulâtres; car, dirent-ils, le nègre sorti d'un sang pur doit être classé avant le mulâtre ou sang mêlé. Ils laissèrent voir d’ailleurs quels étaient leurs inspirateurs, en sollicitant ouvertement les bons offices des députés de Saint-Domingue, « leurs patrons et protecteurs naturels ! ». Les rivalités de classe, si ardentes aux îles, envahissaient ainsi le sanctuaire législatif, et l’argument des colons, prétendant que la plus petite concession sur l’état des personnes entrainerait une révolution, prenait aux yeux des députés toute sa valeur. C'est, du moins, ce qu'espéraient les auteurs de cette diversion. Mais ils ne s’en tinrent pas là. Pour affaiblir la requête des mulâtres, ils traitèrent les requérants d’individualités sans mandat. Ceux-ci durent adresser au Comité de Vérification une lettre établissant leurs qualités? Ils n’eurent pas de peine à démontrer que leur mandat était aussi valable que

1. Arch. parlem., X, 329. Ils offraient une contribution volontaire de 12 millions au lieu des 6, offerts par les mulâtres. — Le procès-verbal ne mentionne pas cefte adresse, mais elle est confirmée par les écrits de Raimond (Vérilable Origine des Troubles de Saint-Domingue, in-12, 55 p., 1192, Arch. colon., coll. Moreau de Saint-Méry, t. CI) et de Grégoire (Mémoire en faveur des Gens de couleur, 1189; — Bibl. nation., Lk 9/70); le Moniteur du 29 novembre (réimpression, Il, 259) la reproduit.

2. Arch. parlem., X, 329; — cf. Raimont, op. cit.