Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

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détruire toutes les autorités existantes. Rien ne doit survivre au régime ancien, lorsque le pouvoir révolutionnaire se montre. Si nous avions, dès le commencement de la guerre, adopté ces principes, nous n’aurions peut-être pas à pleurer sur la mort de nos frères assassinés à Francfort. Les magistrats anciens existaient dans celte ville, et vous vouliez que ce peuple füt libre! Il faut que le système populaire s'établisse, que toules les autorités soient renouvelées, ou vous n'aurez que des ennemis à la tête des affaires. Vous ne pouvez donner la liberté à un pays, vous ne pouvez y rester en sûreté, si les anciens magistrats conservent leurs pouvoirs ; il faut absolument que les Sans-Culottes participent à l'administration. (De nombreux applaudissements s'élèvent dans l'Assemblée et dans les tribunes.) Déjà, citoyens, les aristocrates des pays qu’occupent nos armées, aballus au premier instant, ont conçu de nouvelles espérances; ils ne dissimulent plus leur joie féroce; ils croient à une Saint-Barthélemy; et il ne serait pas difficile de prouver qu'il existe déjà, dans la province de la Belgique, quatre ou cinq partis. Les aristocrates versent de l'or pour égarer le peuple et conserver leur ancienne puissance; on n'y voit que les nobles, le clergé, les états, et le peuple n‘y est rien; il reste abandonné à lui-même : et vous voulez qu'il soit libre! non, il ne le sera jamais, si nous ne prononçons plus fortement nos principes.

« Vous avez vu les représentants de ce peuple venir à votre barre: timides et faibles, ils n’ont pas osé vous avouer leurs principes ; ils étaient tremblants; ils vous ont dit : nous abandonnerezvous? Vos armées nous quitteront-elles avant que notre liberté soit assurée? Nous livrerez-vous à la merci de nos tyrans? Nous ne sommes pas assez forts. Accordez-nous votre protection, vos forces... Non, citoyens, vous ne les abandonnerez pas, vous étoufferez le germe de leurs divisions et des malheurs qui les menacent. (On applaudit.) En Savoie, le peuple s'est prononcé plus fortement; il a commencé par tout détruire pour tout recréer. Alors son vœu n’a plus été douteux; il s’est montré digne d'être libre, et vous a donné un exemple que vous devez porter chez les autres peuples. Suivons donc cette marche dans les pays où nous serons obligés de faire naître les révolutions; mais donnons sûreté aux personnes et aux propriétés. (On applaudit.)

« Vos comités ont cru qu’en proclamant la destruction des abus, des autorités existantes, il fallait que, de suite, les peuples fussent convoqués -en assemblées primaires, et qu'ils nommassent des administrateurs et des juges provisoires pour faire exéter les lois relatives à la propriété et à la sûreté des personnes. Ils ont cru, en même temps, que ces administrateurs provisoires