Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

INTRODUCTION 9

blées quinquennales pour voter et répartir les subsides en argent, qu'il accordait bénévolement au Trésor royal, toujours en détresse. Grâce à ce « don gratuit », il réussit à reconquérir le monopole du culte public dans le Royaume. Oublicuse des nobles exemples donnés par un saint Martin (de Tours) et un saint Hilaire (de Poitiers) et par une pléiade d'évêques, l'Église catholique gallicane réclama l'appui du pouvoir royal, pour se débarrasser, d’abord au moyen âge des Juifs; puis de ceux qu'elle taxait de € prétendus Réformés », enfin de « Messieurs de Port-Royal ». Elle ne comprit pas que la concurrence des uns et des autres lui était plus utile que nuisible et demanda, sans relâche, leur suppression jusqu'à ce qu’elle l’eût obtenue par la révocation de l'Édit de Nantes (1685). Depuis ce moment, la cause de la liberté de conscience fut perdue en France !

Grâce à l'initiative d’Antome Court et à l’héroïsme des protestants du Désert, la conscience fit valoir ses droits à la liberté ; les philosophes du xvm” siècle plaidèrent la cause de la tolérance devant l'opinion publique qui se réveilla et imposa à Louis XVI l'Édit de 1787. Mais, pendant la Révolution, sous le premier Empire et la Restauration, la liberté de conscience, inscrite dans les lois, subit de graves atteintes. C’est seulement sous la monarchie de Juillet et pendant la République de 1848, qu'elle entra dans les mœurs et reprit son développement normal. Au coup d'État du 2 décembre, elle subit une éclipse qui dura dix ans, pour reparaître avec un éclat nouveau dans la deuxième partie du règne de Napoléon II.

Ce sont ces alternalives de défaites et de victoires de la liberté de conscience que nous allons narrer, en recueillant deux séries de témoignages : les actes du pouvoir civil, édits des rois, arrêts des parlements, lois ou décrets des assemblées, d'une part, et, de l’autre, les ouvrages des écrivains, articles de presse ou discours à la tribune, qui représentent l’opinion publique. Les premiers sont tantôt en avance, lantôt en relard sur les seconds ; c’est ainsi que l'Édit de Nantes