Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
SOUS LA MONARCHIE DE JUILLET 199
Un autre débat, touchant la liberté de conscience, fut soulevé presque en même temps par les actes des missionnaires de la congrégation de Picpus, à Tahïti, soutenus par la marine française, et quoique ces actes eussent été commis dans une île minuscule de l'Océanie, presque aux antipodes de la France, ils eurent de suite de l’écho dans le Parlement.
Le comte Pelet de la Lozère, à la chambre des pairs (séance du 21 mars 1843) et M. Agénor de Gasparin, à la Chambre des députés (séance du 21 april 1843) interpellèrent le cabinet à propos d’une note parue dans le HMoniteur du 20 mars qui annonçait que le Roï avait accepté une demande de la reine des îles Tahiti, transmise par le contre-amiral Dupetit-Thouars et tendant à placer ces îles sous le protectorat du roi de France. Tous deux exprimèrent de l'inquiétude pour les missions protestantes déjà établies dans ces îles et la crainte que le conflit avec les missions catholiques n’arrêtât le progrès du christianisme dans cette région. M. Guizot, qui leur répondit en qualité de ministre des affaires étrangères, se défendit vivement d'avoir conçu l’entreprise insensée « de se charger « de la propagande religieuse et d'imposer la foi par force, « même äux payens » et il promit une égale protection de la France « aux missionnaires protestants, qui avaient pénétré « en méme temps que les missions catholiques dans cet « archipel des mers du sud ».
Or, il y avait dans cette assertion une grosse inexactitude, que M. Guizot, mieux informé, a rectifiée lui-même dans ses Mémoires". Les évangélistes de la Société des missions de Londres avaient débarqué le 5 mai 1797 à Tahiti et, après de rudes privations, à force de persévérance, avaient réussi à convertir le Roi et la population de ces îles au christianisme. Et ce n’était que quarante ans après, en novembre 1836, que les deux premiers missionnaires catholiques, détachés de la mission des îles Gambier, ÿ étaient venus. Ayant été éconduits par la reine Pomaré, ils s'étaient plaints d’avoir été offensés dans
1. Tome VIT, p. 52 et suiv.