Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

DE HENRI IV A LA MORT DE MAZARIN 13

enfin la pratique de la charité. Mais, ce qu'il aima par dessus tout, ce fut le peuple, ce paysan de France qu'il avait vu foulé par les soudards, fanatisé par les ligueurs, ruiné par trente années de guerre civile. Il eut pitié de sa pauvreté, de ses longues souffrances et il se promit bien de lui assurer la paix et la sécurité de ses campagnes, dont il avait tant besoin pour reprendre ses travaux el parvenir à un peu d'aisance. Or, il était bien démontré, par une expérience qui avait coûté tant de sang et de ruines, que les Huguenots ne pouvaient êlre ni anéantis, ni ramenés par la force dans le giron de l'Église.

D'autre part, l’insuccès des tentatives de Charles-Quint auprès des luthériens d'Allemagne (Intérim d'Augsbourg) prouvait qu'il fallait renoncer à la chimère de la réunion des deux églises. Henri IV, par esprit de justice et pour acquitter une dette d'honneur envers ses anciens compagnons d’armes, plus encore que par politique, voulut faire sa part aux deux confessions chrétiennes et s’eflorça, en imposant à chacune des concessions, de les amener à se tolérer et à se respecter sous l'égide des lois. Ces vues libérales, par lesquelles il devançait son siècle, ressortent de sa correspondance. « Ce « que j'ai fait, écrit-il à l'un de ses ambassadeurs à Rome au « sujet de l'Édit de Nantes, est pour contester et rassurer « le général de ceux de la religion et, en ce faisant, protéger « les catholiques qui vivent encore en grand nombre dans « les villes occupées par les Réformés ”. »

S 2. — Et ses actes furent conformes à ces principes. Par l’édit de Traversy (1596) qui confirmait la déclaration de Saint-Cloud (1589) et le 1°" édit de Mantes (4 juillet 1591) le roi de France et de Navarre s’engageait à maintenir la religion catholique apostolique et romaine sans ÿ rien innover ; il ordonnait la restitution aux anciens titulaires des églises, presbytères et bénéfices ecclésiastiques, dont les protestants

1. V. Letires-missives de Henri IV en 1597 et 1598. Voyez encore lettres à Mornay du Plessis, à Schomberg.