Histoire du blocus hermétique de la Suisse, pour faire suite à l'histoire du blocus continental : lettre à Lord Parmerston...

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Quant à la question du droit ; le peu que je connais de la jurisprudence des blocus maritimes les admet sur terre pour les forteresses , mais après bonne et due déclaration de guerre; ce qui n’aurait, en aucune façon, légitimé celui de la Suisse en pleine paix. Si M. Thiers se prévaut de ce que Napoléon envisageait l’Helvétie entière comme une grande forteresse, encore devrait-il nous apprendre s’il avait calculé d'avance le nombre d’hommes ou la quantité de filets nécessaires pour cerner les mille et un débouchés de nos Alpes. Bloquer une garnison de deux millions d’hommes, femmes et enfans , dispersés sur un espace de deux mille quatre cent vingt-cinq lieues carrées , n’est pas chose facile. Gare les sorties !

Une autre difficulté préalable , dont il avait oublié de s’occuper , était celle de convenir de la quotepart des frais qui auraient incombé à chacune des six puissances bloquantes. Le blocus d’un pays de cinq cent cinquante lieues de circonférence, en raison des contours, ne saurait s’effectuer sans quelques dépenses assez fortes pour qu’il eùt valu la peine de les répartir par avance’entre les associés. M. Thiers se proposait sans doute d’en rejeter, en fin de compte, la charge sur les Suisses ; mais encore aurait-il fallu en faire les déboursés jusqu’à entier remboursement. C’est même là ce qu’observa , quoiqu’un peu tard , le ministre badois , M. de Dusch, lequel, tout en donnant , le 7 août, l’assentiment de son maitre au blocus, eut grand soin de déclarer, en son nom, aux autres coalisés, qu’il n’entendait contribuer en rien aux frais de l’entreprise. Le diplomate allemand avait de l'avenir dans l’esprit, puisqu’en bonne justice, la France, vu l'étendue de ses frontières , devait contribuer pour une somme incomparablement plus forte que la Bavière, par exemple, qui ne tient à l'Helvétie que par