Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

PENDANT LA RÉVOLUTION. 565

voir combien elle a été écrasée dans une des dernières séances de la Convention. »

Notre jeune étudiant commence à perdre peu à peu cet imperturbable optimisme qui depuis trois ans a résisté à tous les événements : comme il est d'une entière bonne foi, d'une sincérité indiseutable, il ne peut plus dissimuler à sa famille les déceptions profondes qu'il éprouve, les anxiétés que lui causent les événements qui se préparent dans l'ombre, l’effroi qu'il ressent en voyant Marat et Robespierre afficher audacieusement leurs projets sanguinaires :

« Du 4 octobre.

« Ce ne sont pas les Jacobins qui soutiennent Marat : c'est seulement la lie des Jacobins; c'est environ une centaine de membres, s’intitulant la société, qui correspondent avec les clubs affiliés et qui sont parvenus à faire déserter la place à tout homme doué de quelques principes de justice et de moralité. Les vrais Jacobins, les seuls encore dignes de porter le nom d'amis de la liberté et de l'égalité, sont les Brissot, les Pétion, les Kersaint, les Barbaroux, les Guadet, les Cambon, les Louvet, etc., en un mot tous les ennemis implacables des tyrans et des dictateurs. Ceux-ci ont abandonné Ja société parce qu'ils n'ont pas voulu se soumettre à de vils ambitieux, plus méprisables, s'il était possible, que les antiques oppresseurs que nous venons d'abattre; parce qu'ils n'ont pas voulu se rendre les com-