Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

PENDANT LA RÉVOLUTION. 367 sinat, des anarchistes, avides de pillage et dévorés d'une soif inextinguible de sang, tiennent entre leurs mains les destinées de cette malheureuse cité. Leur audace s'accroît par l'impunité, et déjà ils brûlent de renouveler les horribles journées de septembre : ce n'est plus dans les ténèbres d'un souterrain qu'ils aiguisent leurs poignards, c'est au milieu même des places publiques; c’est là qu'ils demandent à grands cris la tête des citoyens les plus recommandables, c'est là qu'ils menacent d'une mort prochaine plusieurs de nos représentants; des listes de proscriptions sont affichées par toutes les rues; d’atroces placards invitent le peuple souverain de Paris à une nouvelle insurrection; l'on n'ose pas encore, c'est vrai, désigner formellement quelles autorités constituées doivent frapper les foudres du peuple, mais l’on y exalte l'Assemblée de la Commune, l'on y blasphème contre la Convention Nationale. et c'est en dire assez. De secrets agitateurs répandus parmi le peuple, adoptant son langage, ses manières, son costume, alimentent sa méfiance, flattent ses excès, le séduisent, l'égarent, lui communiquent toutes leurs fureurs et leur sombre férocité. De prétendus apôtres de la liberté, professent en tous lieux la doctrine de Marat, ils excitent ouvertement à la rébellion et au meurtre, ils appellent le mépris sur la Convention et la confiance la plus aveugle sur l’Assemblée de la Commune. La question du partage des terres est sans cesse agitée par eux, ils