L'Autriche et la Hongrie de demain les différentes nationalités d'après les langues parlées : avec de nombreux tableaux statistiqes et 6 cartes ethniqes
Er
D’autres placent leur arrivée vers le sixième siècle, venant d’au delà des Carpathes et leur assignent la même origine que les Tchèques. «Après le royaume éphémère de Samo, dont nous ne connaissons ni les limites ni la puissance (1), le royaume de Grande-Moravie unit un moment, au neuvième siècle, les Slovaques et les Moraves, auxquels vinrent bientôt se joindre les Serbes de Lusace, les Polonais et les Tchèques groupés en une union plus ou moins étroite. Ce fut la plus brillante période du peuple slovaque. Celle à laquelle les historiens se reportent, chaque fois qu’ils veulent éveiller le sentiment national par le souvenir des anciennes libertés. » Voilà donc près de dix siècles que les Slovaques sont séparés des Tchèques et qu’ils sont, plus ou moins, sous Ja domination des Magyars. Cet état de choses a fait qu’ils se sont, peu à peu, détachés de leurs frères d’au delà des Carpathes. Longtemps ils ont vécu repliés sur euxmêmes, vivant par petits groupes dans les vallées à la recherche de pacages pour leurs troupeaux. « C’est au dix-septième siècle que l’idée nationale commence à se manifester plus clairement chez les Slovaques. La littérature cesse d’être entièrement religieuse, les idées de nation s’éveillent. 11 est très intéressant de constater que, dès la première heure, l’idée de patriotisme slovaque prend, s’il est permis de parler ainsi, un caractère panslave. On sent chez eux un désir d'union avec les peuples frères, une volonté encore obscure de se grouper pour être plus forts et ne pas disparaître. Ce sentiment, dont on trouve les traces dès 1603, ne cesse de se développer dans la suite. À un moment donné, il est si profond qu’il devient l’idée directrice de toute l’histoire des Slovaques (2). »
La langue eut done une égale importance chez eux que chez les Tchèques. Néanmoins, malgré leur commune origine linguistique, il y eut des moments de scission malheureuse. Antoine Bernolak proclama le slovaque langue indépendante (1787) et, parmi les trois principaux dialectes slovaques, il choisit celui de l'Ouest. Cette tentative faite par un prêtre catholique ne réussit pas; car elle mécontenta, naturellement, les protestants restés fidèles au tchèque. Vers 1840, Ludevit Stûr, après avoir affirmé solennellement la communauté de langue avec les Tehèques, finit par déclarer que le slovaque est une belle langue, plus près du vieux slave que le tchèque. Et, vers 1844, il abandonna le tchèque pour adopter le dialecte slovaque du Centre, plus éloigné du tchèque que le dialecte de l'Ouest choisi par Bernolak.
Mais l’union des Slovaques avec les Tchèques n’a pas été interrompue pour cela. À l’heure actuelle, la nation tchéco-slovaque est absolument unie et elle espère bien arriver à être indivisible.
L’aire géographique de la langue slovaque en Hongrie n’a été indiquée jusqu'ici, à ma connaissance tout au moins, que dans ses grandes lignes (comme je l’ai fait moi-même p. 25 et 29). Mais il m'a paru qu'il serait utile de la donner avec plus de détail, non plus seulement par comitats, mais encore par arrondissement, afin de suivre de plus près le groupement linguistique qui s’est maintenu envers et contre tout, malgré les persécutions séculaires des Hongrois, surtout depuis 1867. C’est ce que j’ai obtenu par les tableaux ci-après,
(1) H. Tourrzer, Louis Stür et l’idée de l’ Indépendance slovaque (1815-1856). Paris, 1913. (2) H. TourTzer, L, c., p. 6.