La crise balkanique (1912-1913)

12 LA CRISE BALKANIQUE

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moment à mettre en opposition les beys avec une certaine partie du pays.

Le langage tenu en substance par les émissaires des Jeunes-Tures était celui-ci : « les beys vous pressurent, la terre qu'ils possèdent a été par eux volée à vos ancêtres, nous vous aiderons à la reconquérir, mais pour nous comprendre il nous faut une même langue, apprenez le turc ». Dans un Congrès truqué à Dibra, en 1909, les Jeunes-Turcs faisaient approuver par des délégations albanaises le désir de celles-ci de se voir enseigner le turc. Les beys ressaisissant leur influence organisèrent, en réponse, à El-Bassam un congrès

national auquel le paysentier fut convié. Les décisions prises, les volontés librement exprimées nous enseignent très justement sur l’état d'esprit — l’état exact — des populations albanaises à la veille des transformations politiques que l'Europe leur réservait. M. G.-L. Jarray rapporte, dans son remarquable ouvrage Au Jeune Royaume d’Albanie, p. 86, de la manière suivante la conversation qu'il a eue dans le palais de Derwisch bev avec un personnage important à l'issue même du Congrès d'El-Bassam : « Autonomie signifie bien liberté, mais il signifie que nous devrionstout faire nous-mêmes : or nous n'avons pas d’argent, pas d'organisation ; alors que le monde

entier s’est enrichi et outillé, nous sommes pauvres