La France sous le Consulat
204 LA FRANCE SOUS LE CONSULAT
ostensiblement par le fourrier de la compagnie de grenadiers de la 46° demi-brigade, dans laquelle il servait. Le nom de Latour-d’Auvergne sera maintenu dansles contrôles et dans les revues ; il sera nommé dans tous les appels, et le caporal de l’escouade dont il faisait partie répondra par ces mots : « Mort au champ d'honneur !* »
Ces honneurs et ces récompenses, en attendant la suprême glorification de la Légion d'honneur, ne suffisent pas cependant à expliquer l’indestructible prestige qui environne Bonaparte et les dévouements qu’il suseite. C’est dans son contact permanent, dans sa communion d'esprit avec ses soldats que réside surtout le secret de son ascendant, « Voyez beaucoup le soldat, écrit-il au général Marmont *, et voyez-le en détail. La première fois que vous arriverez au camp, bordez la haie par bataillon, et voyez huit heures de suite les soldats un à un; recevez leurs plaintes, inspectez leurs armes, et assurez-vous qu'il ne leur manque rien. Il y a beaucoup d'avantages à faire ces revues de sept à huit heures; cela accoutume le soldat à rester sous les armes, lui prouve que le chef ne se livre point à la dissipation et s'occupe entièrement de lui; ce qui est pour le soldat un grand motif de confiance. » — « Il ne faut pas toujours s’en rapporter aux chefs de brigade, mais voir le soldat et, s’il a des plaintes à faire, lui faire justice. * » Ce qu'il ordonne à ses lieutenants, il le fait lui-même. Il ne se contente pas de visiter les casernes, de s'assurer que les soldats sont bien couchés et bien nourris, de provoquer leurs réclamations. de les appeler par leur nom, de les tutoyer, de leur pincer l'oreille, de leur rappeler leurs campagnes et leurs faits d'armes, mais, jusqu’à 1804, ilinvite à sa table, parfois au nombre de deux cents, les militaires et les marins qui ont obtenu des armes d'honneur,
1. Arrêté du 15 juillet 1803. 2. Corr.,t. IX, 12 mars 1804. 3. À. Murat. Corr.. t. VIII.