"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (са посветом аутора)

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CHAPITRE PREMIER.-

dont il était, comme on le verra, non seulement le prédécesseur, mais aussi en quelque sorte l'initiateur. C’est ainsi qu’il publia, en 1821, un livre assez étrange : prétendue traduction de « l’esclavon », intitulé Smarra, ou les démons de la nuit, songes romantiques 1 . Dans la préface, il nous raconte que cet ouvrage, dont il « n’offrait que la traduction », est moderne et même récent. « On l’attribue généralement en Illyrie, dit-il, à un noble Ragusain qui a caché son nom sous celui de comte Maxime Odin , à la tête de plusieurs poèmes du même genre. Celui-ci, dont je dois la communication à l’amitié de M. le chevalier FédorovichAlbinoni, n’était point imprimé lors de mon séjour dans ces provinces. Il l’a probablement été depuis. » Il existait à cette époque un certain comte KregliaNOViCH-Albinoni, auteur d’un mémoire sur la Dalmatie, que Nodier connaissait, puisqu’il en a parlé, en 1813, dans les numéros 15 et 16 du Télégraqohe officiel de Laybach, et dans le Journal des Débats du ler1 er février 1815 ; mais un « chevalier FÉDOROVICH-Albinoni » n’a jamais existé pour la raison bien simple que le nom de Fédorovich n’est pas serbo-croate mais russe, tandis que la famille d’Albinoni était une famille italo-dalmate. Nodier a donc forgé un nom imaginaire, et lui a donné un air d’authenticité, en le modelant sur le nom qu’il avait cité plusieurs fois auparavant et dont personne ne pouvait mettre en doute l’existence. Comme il l’avait prétendu en 1819, au Journal des Débats, au sujet du Vampire, nouvelle faussement attribuée à Byron, Nodier affirma de nouveau que smarra n’est que « le nom primitif du mauvais

1 A Paris, chez Ponthieu, pp. 212, in-12 ; prix : 3 francs.