"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université
AVANT-PROPOS.
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des vers illyriques. Les Allemands découvrent bien des choses, on le sait, et celui-là me demandait encore des ballades pour faire un troisième volume. « Enfin, M. Pouchkine a traduit en russe quelques-unes de mes historiettes, et cela peut se comparer à GU Blas traduit en espagnol, et aux Lettres d’une religieuse portugaise traduites en portugais. « Un si brillant succès ne me fit point tourner la tête. Fort du témoignage de MM. Bowring, Gerhart et Pouchkine, je pouvais me vanter d’avoir fait de la couleur locale', mais le procédé était si simple, si facile, que j’en vins à douter du mérite de la couleur locale elle-même et que je pardonnai à Racine d’avoir policé les sauvages héros de Sophocle et d’Euripide. » Ce récit fut, pendant longtemps, l’unique source de renseignements sur le sujet, tant pour les biographes de Mérimée que pour les historiens de l’époque romantique. L’ironie de ce passage a éveillé une méfiance générale. M. Augustin Filon, le distingué biographe de Mérimée, sachant bien que ce railleur impitoyable, qui nous a donné la Vénus d’ille et la Chambre bleue, avait trop de goût et trop d’esprit pour faire de pareilles confessions, M. Filon, disons-nous, alla, non sans raisons, jusqu’à qualifier ces deux pages de « nouvelle mystification greffée sur celle de 1827 1 ». Cependant, à l’exception de P. V. Annenkoff, qui a publié, en 1855, ses Matériaux pour servir à la biographie de Pouchkine (en tête delà grande édition du poète russe que Mérimée a dû posséder !), et de M. Jean Skerlitch, qui a donné, en 1901 et 1904, plusieurs articles sur la fortune de la poésie serbe en France
1 A. Filon, Mérimée et ses amis, Paris, 1894, pp. 37-38.