La question du sel pendant la Révolution

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« ferme, brisé les barrières des frontière de la Bretagne 1, brûlé tous « les bateaux de la Loire et même sur votre étang. Le tout s’est « passé sans répandre du sang... c’est une grande preuve de la « douceur de nos mœurs. »

Une émeute contre la gabelle qui a dû faire une impression particulièrement forte sur la Constituante est celle qui éclatait à Versailles même, le 21 août 1789. On n’est, malheureusement, que très peu renseigné à son sujet. Le registre du greffe du grenier à sel de Versailles n’en parle pas; Laurent-Hanin? est également muet à cet égard. Il faut recourir aux débats de l’Assemblée même pour être renseigné : « Sur le rapport fait par un membre du Comité des subsistances, d’un attroupement qui a eu lieu aujourd'hui (21 août), à Versailles, par suite duquel le prix du sel a été baissé à six sous, l’Assemblée charge son président de prendre des renseignements relatifs et d’en communiquer avec le pouvoir exécutif °». Cette enquête a-t-elle été faite? Nous n’en avons pu découvrir les moindres traces. Toujours est-il que Dupont (de Nemours) fit la proposition suivante dans la soirée du 21 août‘:

« L'Assemblée Nationale, informée qu’il s’est fait aujourd’hui, dans Versailles, un attroupement, et que ceux qui le formaient ont exigé que le sel leur fut livré à prix arbitraire’, a ordonné que

! L’Anjou, nous l’avons vu, était Pays de grandes gabelles, la Bretagne était Province franche.

? LAURENT-HANIN. Histoire municipale de Versailles, Versailles, 1885.

$ Archives parlementaires, t. VII, p. 467.

4 Archives nationales. C. 30, chemise 250, pièce 51.

5 Une trace curieuse de ce mouvement se trouve dans l’interrogatoire de Louis-Antoine Chevalier, maréchal-ferrant, « à la Chambre criminelle de la Prévôté de l'Hôtel sise à Versailles, enclos de la Geôûle », du 22 août 1789 (Archives départementales de Seine-et-Oise ; Prévôté de l'Hôtel, 1789, B. Greffe). On y lit: « ... Interrogé si, étant à boire chez la ladite femme Chauvigny (cabaretière qu’il est accusé d’avoir menacée). il n’a point dit dans son cabaret que c'était lui qui avait fait mettre le sel à six sols, qu’ils étaient cinq cents hommes à Versailles armés et qu’ils avaient encore un projet, qu’il voulait qu’on mangeat la viande à huit sols la livre, et que si les bouchers ne voulaient pas la diminuer, on irait à Poissy chercher des bœuis et qu’ils les tueraient eux-mêmes.

(«A répondu qu'ayant été plusieurs fois à la porte (de la salle) des menus plaisirs, il a entendu tenir ces propos par le public qui était à la dite porte, que lui, répondant, les a répétés dans le cabaret de ladite femme Chauvigny, et que ce n’est point lui qui les a inventés de son chef. »

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