La question du sel pendant la Révolution

pas tenu compte de la proposition des Angevins <« un cri terrible et universel de proscription s’est élevé contre la gabelle ». Toute la garde nationale de l’Anjou, une soixantaine de mille hommes, se sont armés. « Les barrières ont été renversées, les pataches détruites, les bacs brûlés. Il a été fait défenses aux directeurs et aux receveurs de faire aucune fonctions. Les armes et les chevaux des employés ont été vendus à l’encan. Le prix leur a été distribué, et il leur a été enjoint de sortir dans le délai de trois jours des villes, bourgs et villages de l’Anjou. Toute perception d'impôt a été ensuite interrompue. Les collecteurs de la taille, les préposés au recouvrement des vingtièmes, ont cessé de recevoir les contributions des redevables, et les habitants des villes et des campagnes ont déclaré qu’ils ne payeraient aucune espèce d’impôt tant qu’on voudrait les assujettir au régime même adouci des gabelles ! ».

Effrayé par l'explosion de l’action directe, le Comité général d'Angers fit parvenir, au commencement d'octobre, une lettre circulaire à toutes les municipalités de l’Anjou, les invitant à envoyer, le 6 de ce mois, un député à Angers, muni de pouvoirs suffisants, à l'effet d’aviser à un remplacement en argent de l'impôt du sel, rétabli par l’Assemblée nationale ?.

La réunion des délégués eut lieu, comme prévue, le mardi 6 octobre 1789, à Angers, dans l'Eglise des prêtres de l’Oratoire. Environ 300 citoyens y représentaient les paroisses Angevines. L'avocat Delaunay l'aîné et Dehoulières furent désignés pour porter à l’Assemblée la proposition des communes angevines, de remplacer l'impôt de la gabelle par une prestation pécuniaire, à raison de 60 livres le minot et d'offrir de payer par avance les trois premiers mois du rôle.

Cette proposition montre à quel degré la gabelle était détestée. L’Anjou, en effet, offrait le double du prix du sel gabelé, à condition d’être débarrassé de l’ancien régime des sels.

Le 11 octobre les deux délégués extraordinaires arrivèrent à Versailles. Voici en quels termes ils rendaient compte de leurs

1 Allocution des députés extraordinaires de la province d'Anjou à l’Assemblée nationale, le 24 octobre 1780. Cf. Archives parlementaires, t. IX, p. 515.

2 Cf. Extrait du registre des délibérations prises aux assemblées du général des habitants de la ville de Baugé, dans Correspondance de MM. les Députés de da province d'Anjou avec leurs commettans, relativement à l'Assemblée Nationale. Angers 1789, t. 111, p. 184. (Bibliothèque Nationale. Le ?/145).