La question du sel pendant la Révolution

ERNEST

Pierre-Louis Roederer !, étendant le débat, demande l'abolition générale de la gabelle, en montrant les dangers de son maintien. «Mais, Messieurs, s'écrie-t-il, si par malheur vous vous déterminiez à rétablir ces barrières funestes, quelle serait la force dont vous prétendriez vous servir? Croyez-vous que des citoyens revêtus de la giberne sacrée de la patrie, voulussent s’avilir au point de devenir les agents subalternes du fisc? ?».

Enfin Charles de Lameth *“ insiste également sur la suppression générale de la gabelle et son remplacement par un impôt accessoire à la capitation.

C’est après ce discours que la clôture de la discussion est demandée et votée. L'Assemblée décréta l’ajournement de l'affaire et le renvoi au Comité des finances, avec mission de s'occuper incessamment de la suppression totale de la gabelle et des moyens de remplacer cet impôt.’

Quoique non dans sa lettre, la proposition de l'Anjou avait triomphé.L’Assemblée avait reconnu l'urgence de la suppression de la gabelle. Dehoulières et Delaunay, fiers de leur succès, pouvaient écrire à leurs commettants, le 28 novembre: « L'affaire concernant la gabelle est enfin terminée de la manière qui fait le plus grand honneur à la province d’Anjou, puisqu'elle peut se regarder, à juste titre, comme la cause de la suppression universelle de cet odieux impôt dans toutes les provinces du royaume f?.

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Le mouvement angevin n'était pas, bien entendu, la seule résistance au décret du 23 septembre. En Alsace, par exemple,

? Conseiller au Parlement de Metz, député du Tiers de cette ville.

? Ce discours, que ne mentionnent pas les Archives parlementaires est résumé dans la Correspondance.…., t. 111, p. 212. — Qu’on observe, sous la phraséologie prudhommesque de l’orateur, le mépris de cet homme de loi pour la ferme et pour les fonctions policières.

3 Cf. Journal des Elats généraux. P. 1789, t. vr, p. 161.

4 Charles-Malo-François, comte de Lameth, député de la Noblesse de la gouvernance d'Arras.

5 Voir le texte de cet arrêté : Pièces justificatives, Lois IY.

6 Cf. Correpondance.., t. 111, p. 211 sqs.

7 Telle est aussi l’opinion du constituant Thomas Lindet. Le 28 novembre, il écrit aux officiers municipaux de la ville de Bernay : « Il est probable que la gabelle va recevoir le dernier coup sous peu de jours. La province d'Anjou aura accéléré sa destruction.» (Correspondance de ThoMAs LINDET, publiée par AMAND MONTIER. Paris, 1809, p. 22.)