La révolution française à Genève : tableau historique et politique de la conduite de la France envers les Genevois, depuis le mois d'octobre 1792, au mois de juillet 1795
w Less 1
proclamer le fameux Décret qui ordonnait aux Généraux Français de fecourir, par-tout, les peuples opprimés; que les plus exaltés des natifs menaçaient formellement d’invoquer ce fecours; qu’enfin l’armée qui le leur offrait n’attendait que le fignal du choc inteftin le plus léger pour pénétrer dans nos murs, où elle avait des partifans, &r même une efpèce d’avantgarde. Cependant, je vous Pavouerai, Monfeur, fi l’on eût fuivi mes avis, on n'aurait point héfité à employer la force ouverte contre ces partifans; car, à mes yeux, c'eff fur-tout dans les Etats libres, dans ceux où les loix font, ou repréfentent l’expreffion du peuple qui leur eft foumis, que le premier devoir des dépofitaires de ces loix eft d’en conferver le dépôt au péril de leurs vies, & pour cet effet d'attaquer à force ouverte toute fa&tion qui ofe annoncer l'intention de les renverfer par la force. Je foutins en vain cetavis: l’hornible étendue des dangers extérieurs qui menaçaient notre indépendance glacèrent prefque tous les courages, ou plutôt les firent céder aux fuggeftions plus puiffantes de la prudence, & à des efpérances qui n’ont été, il eft vrai, que trop illufoires. Néanmoins là tournure douce & bénévole que parut prendre la première Révolution
.qui va fuivre, nous donna occafñon plus d’une fois de nous féliciter d’avoir fait céder le droit à la circonfpection: mais la Révolution que celle-ci amena dix-huit mois après, & qui, en nous ôtant jufqu’à l'honneur, a détruit & renverfé tout ce que nous avions alors efpéré fauver, vous fera aifément comprendre, avec quelle