La révolution française à Genève : tableau historique et politique de la conduite de la France envers les Genevois, depuis le mois d'octobre 1792, au mois de juillet 1795
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Sur des affurances auf poñtives, les défapprobateurs trop pleins de confiance dans ceux qui les leur donnaient, & dans le caractère de leurs compatriotes, fe réunirent pour accepter fans plus héfiter cette nouvelle Conftitution qui devait, leur difait-on, ramener l’ordre & la tranquillité En conféquence elle fut fanctionnée en Confeil fouverain le $ Février 1794, à l’étonnante pluralité de 4200 fuffrages contre 200; & le parti attaché aux anciens loix voulut achever de gagner les égalifeurs par une autre preuve de confiance, en leur donnant exclufivement fes fuffrages pour les nouvelles magiftratures.
Sans renoncer, il eft vrai, à fes anciennes opinions fur ce qui conftitue une liberté fage & tempérée, la grande maffe de notre peuplade fe montrait à chaque occafon prête à foutenir de toutes fes forces ce nouveau Gouvernement Conftiturionnel, pour l'aider à faire face aux difficultés du dehors, & aux déforganifateurs du dedans. Enfin, comme l’indigence avait beaucoup augmenté, foit par la guerre du continent, qui réduit toujours le commerce de notre principale manufaûure, foit par la longue oifiveté de la claffe des ouvriers révolutionnaires, les Genevois riches ou aifés foufcrivirent un capital confidérable pour faire travailler les atteliers, en attendant qu'il s’ouvrit des débouchés à leurs produits.
Graces à tant de nobles facrifices, foit d'intérêts privés, foit de paffions politiques, Genève femblait naviguer encore tranquillement à côté de la tempête Françaife, dont elle voyait tout autour d’elle lesnaufrages & les débris. La Suiffe elle-même, étonnée