Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

CHAPITRE SEPTIÈME. 207

Les Monténégrins sont superstitieux, et tout en vérité se réunit chez eux pour porter au plus haut degré cette disposition de leur esprit à des croyances surnaturelles : leur ignorance absolue des lois de la nature et de Paction des principaux agents physiques, une religion des moins éclairées, une imagination poétique et exaltée, le respect pour les traditions même les plus étranges, les récits merveilleux auxquels, dès l'enfance, leurs oreilles ont été accoutumées. Ils croient à l'existence de génies bons ou mauvais (dobra Srita, ne serütcha; duhr tcisti, duhr netcisti), se manifestant de diverses manières, tantôt sous la forme d’un serpent, tantôt sous celle d'une lumière nocturne, ou même d'un souffle aérien. Pour eux, les bois, les rochers, les sources, les montagnes n’ont pas encore perdu les traces et le souvenir de ces nymphes charmantes dont la mythologie les avait peuplés, et la vila a remplacé toutes ces poétiques déités disparues. Bon génie de l'homme dont elle partage les joies et les douleurs, la vila se glisse partout, voit et connaît tout : elle hante les pics inaccessibles; on la retrouve au com du foyer. Voyez, de la plaine de Tseltinjé, cette abrupte montagne qui cache dans la nue son front grisätre et sourcilleux : c’est le Lowchen, c’est la demeure des vilas.

« D'ici, delà, s'élève une montagne plus haute l’une que l'autre; mais la plus haute est le Lowchen. Il n’y croît que des orties et des épines. La cime est couverte d’une neige éternelle, et l'orage y mugit toute l’année. C’est là que demeurent les vilas, c’est là qu’elles dansent en cercle.

« Au pied de cette montagne, passe un héros qui s’en va cherchant le bonheur de l'amour. Les vilas Paperçoivent et lui crient :

« Viens parmi nous, viens; c’est ici que tu trouveras le