Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

218 LE MONTÉNÉGRO CONTEMPORAIN.

plissement des cérémonies, les pèlerins trop fervents, à force de libations, ont, bien avant de rentrer à l'église, absolument perdu le sentiment et le souvenir du saint devoir qu'ils étaient venus remplir.

Aucune solennité religieuse n’a conservé autant que la fête de Noël les souvenirs et la poésie du passé. Suivons-en les cérémonies dans la capitale, où la présence de la petite cour et des grands personnages du pays y donne un éclat tout particulier. Dès la veille du grand jour de la Nativité, le prince, précédé de la compagnie des perianiks et kabadahies, et escorté par tous les sénateurs, chefs ou employés, les uns à cheval, les autres à pied, se rend dans l’une des forêts qui s’étagent sur les versants du Lowchen, pour y couper le bois de Noël ou badnjak. Là, chacun taille à sa guise la branche la plus belle et la plus longue, ou même l'arbre le plus coquet qu'il pourra transporter; puis l'on se remet triomphalement en marche, au bruit des détonations de la mousqueterie, les piétons l'épaule chargée de leur pesant fardeau, les cavaliers appuyant élégamment sur l'étrier, à la façon d’une lance, le grand badnjak aux branches couvertes encore des feuilles jaunies de l’automne. Rien de plus pittoresque que le retour du cortége, traversant les rues de Tsettinjé au milieu des vivats et des coups de pistolet, et enfin s’arrêtant devant la résidence princière, contre le mur d'enceinte de laquelle chacun va déposer son badnjak. Suivant la coutume orthodoxe, le sol des appartements du palais se couvre de paille, etc’est la seule couche où se reposeront ceux qui n'auront point le courage de passer la nuit blanche. La fête est commencée, et dans chaque famille de la Montagne-Noire se font de semblables préparatifs.

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