Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

16 LE MONTÉNÉGRO CONTEMPORAIN.

journées de Grahovo coûtèrent aux Monténégrins quatre cents hommes tués ; les pertes des Turcs furent huit ou dix fois plus considérables : un officier de la gendarmerie autrichienne, envoyé sur les lieux quelques semaines après, put encore compter deux mille deux cent trente-sept squelettes épars autour de Grahovatz.

L’émotion produite par la victoire de Grahovo fut immense dans tout l'Orient ; l'Herzégovine insurgée servit de passe-temps aux fureurs des bachibouzouks, jaloux de venger sur des chrêtiens le massacre des soldats d’HusseinPacha, et les rajas, comptant sur les futurs succès des Monténégrins, osèrent partout relever la tête. Mais, loin de profiter de sa victoire, Danilo enchainé par les prudents conseils de la diplomatie, attendait de la réunion d’une conférence le règlement des questions toujours pendantes entre la Porte et son gouvernement.

Le 24 juillet eut lieu pourtant, sur la frontière d’Albanie, un nouveau combat dans lequelles Monténégrins, attaqués par un parti turc de Podgoritsa, eurent le dessous. Repoussés jusqu'à Farmaki , ils durent se retirer derrière la Sitnitza, et, d’après les ordres du prince, assister l'arme au bras au ravage de leurs moissons. Quelques jours après (28 juillet), Novitza Tserovitch et le voivode Milian, franchissant les arêtes du mont Javor, se jetaient sur les Kolaschini supérieurs, qui avaient à plusieurs reprises opéré des razzias chez les Koutchi, et mettaient à sac leurs villages et leurs propriétés. Cet acte impolitique, dirigé contre une tribu qui, par sa position, couvrait la frontière monténégrine et devait être ménagée comme ennemie des Turcs eux-mêmes, reçut la désapprobation du prince, qui destitua Tserovitch et Milian, et donna aux Kolaschini des compensations dont ils se montrèrent pleinement satisfaits.

Dans le courant d'octobre, la commission européenne, dont faisaient partie les ambassadeurs des grandes puissances accrédités auprès de la Sublime Porte, et chargée de régler les questions relatives audifférend turco-monténégrin spécialement celles des frontières, se réunit à Constanti-