Le mouvement des idées : sur une histoire de la Révolution

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tandis que les politiciens — «y compris les hommes honnêtes comme Robespierre » — n'étaient point disposés à recourir encore à l'intervention des bonnets de laine. « Tout comme les radicaux parlementaires de nos jours, ils avaient peur du grand inconnu, du peuple descendu à la rue, qui aurait pu S€ rendre maître des événements; et, n’'osant s’avouer cette peur de la révolution égalitaire, ils expliquaient leur attitude indécise comme un souci de conserver, du moins, les quelques libertés acquises par la Constitution. Aux chances incertaines d’une nouvelle insurrection, ils préféraient la royauté constitutionnelle. » L’insurrection ne s’en fit pas moins, — et une fois de plus, ils la suivirent. Du reste, elle ne réussit qu'à moitié : « Le peuple descendit dans la rue, maïs, incertain quant à l'attitude de la bourgeoisie, il n'osa trop se COmpro" mettre. Il semblait tâter le terrain pour voir jusqu'où l'on pourrait aller au château — et laisser le reste aux accidents de grandes manifestations populaires. » On mit un bonnet rouge à Louis XVI, sans obtenir rien de précis. Mais après cette tentative avortée, le peuple se recueillit et se mit à préparer le 10 août. À travers les pages de M. Kropotkine (p. 360 et suiv.), nous le voyons procéder, avec une sorte de méthode, en calculant ses actes : « Il créa spontanément, pour les besoins du moment, l’espèce d'organisation sectionnaire qui fut jugée utile pour donner au mouvement la cohésion nécessaire. Pour les détails on s'en remit à l'esprit organisateur du peuple des faubourgs : et lorsque le soleil se leva sur Paris le ro août, personne n'aurait encore pu prédire comment finirait cette grande journée. » Les politiciens étaient écartés : on n'avait pas besoin d'eux; ils ne servent à rien quand il faut agir.

Les choses se passent à peu près de la même manière quand s'organise la Commune de Paris, quand le peuple