Les fêtes et les chants de la révolution française

XXII PRÉFACE.

sont les plus raffinées. Là, le peu d'œuvres actuellement produites dans l'esprit que nous venons de définir sont l’objet d'un dédain universellement avoué. La musique qui cherche sa source dans un sentiment humain et collectif — aujourd'hui par conséquent la musique nationale — n'a pas deplace marquée pour elle dans le domaine de l’art. Elle semble, en vérité, n'avoir pas le droit d'exister. Il n’y a que la musique religieuse qui compte. Pour celle-ci, quelle différence! Non seulement elle occupe dans l’église la très large place qui lui revient légitimement dans les cérémonies du culte, mais, hors de son milieu naturel, elle est très haut cotée. Elle occupe une place éminente dans la hiérarchie des genres. Psaumes, motets, cantiques, sont accueillis avec empressement avec abondance sur les programmes de nos plus grandes sociétés de concerts. Sans parler de Palestrina, de Bach, de César Franck, et pour nous en tenir à l’époque qui fait l’objet de cette étude, on a vu longtemps, on voit parfois encore Cherubini, Gossec, Méhul, Lesueur, y figurer avec des Messes, un Ave Maria, un O Salutaris, la Prière des Hébreux, le motet de Noël : In media nocte; mais les œuvres que les mêmes auteurs ont écrites pour les fêtes civiles n'ont pas survécu d’un jour aux occasions qui les ont fait naître. Que quelque imprudent se garde bien de vouloir les faire entendre dans une audition sérieuse : en faire seulement la proposition serait un scandale! Non que la valeur des œuvres soit en cause; mais l'opinion régnante a décidé que les productions de cette sorte n’appartiennent pas au genre sérieux : cela suffit à les condamner d'avance.

Nous avons eu assez récemment un exemple de cet état d'esprit musical, quand un de nos principaux concerts symphoniques accueillit une des rares œuvres modernes dont l’auteur n’a pas dédaigné (jusqu'à deux fois!) de faire servir son art à la glorification d'une grande idée moderne et d’un grand homme : l’'Hymne à Viclor Hugo de M. Camille Saint-Saëns ‘. Cette belle page orchestrale fut

1. L'autre œuvre de M. Saint-Saëns qui rentre dans cet ordre d'idées est sa Marche héroïque à la mémoire d'Henri Regnault : il ne q q

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