Les fêtes et les chants de la révolution française

LA FÊTE DE LA FÉDÉRATION. 29

reprise par tout le peuple, une marche militaire à l'orchestre décrivait l'attaque de la Bastille; le canon tonnait, les clairons sonnaient la charge; soudain, l'orchestre tout entier faisait explosion; c'était la fin du combat; le peuple et le coryphée lançaient une dernière phrase tirée du livre de Judith :

Expulsi sunt (inimici) nec potue- Nos ennemis sont fugitifs, ils runt stare. El erunt opprobrium | n’ontpu nousrésisterelils seront in gentibus. en opprobre parmi les nations.

Populi, laudale Deum. Peuples, louez Dieu.

Et tout le monde entonnait le Te Deum.

C’est ainsi que la prise de la Bastille fut, au jour de son anniversaire, chantée en pleine église Notre-Dame, sur des verseis des deux Testaments. Le fut-elle en latin ou en français? Nous ne saurions le dire : les documents contemporains donnent le texte dans les deux langues. tel que nous l'avons reproduit; mais comme l'hiérodrame se maintint au répertoire des fêtes nationales jusqu’à une époque postérieure à la fermeture des églises, nous pourrions croire que ce long succès fut dû en partie à l'usage de la langue populaire, le français. Nous le retrouvons jusque sur le programe de la fête du 14 juillet 1794; mais, à cette époque de luttes désespérées, le Te Deum d'actions de grâce ne fut pas chanté à la fin : il fut remplacé, en manière de conclusion, par le chœur d’Armide, plein d’une agitation belliqueuse : « Poursuivons jusqu’au lrépas l'ennemi qui nous offensel »

Quoi qu’il en soit, l'œuvre, dans son ensemble, produisit un grand effet, si nous en jugeons par les comptes rendus du lendemain, qui marquent une admiration étonnée :

« L'ouverture, dit l’un, fut un morceau noble qüi pénétra les âmes et les amena par une pénible anxiété