Les idées du Comte de Maistre sur l'éducation des femmes : discours prononcé dans la Société des Conférences de la Palombelle, au college romain
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Bientôt le ton de la correspondance s'élève. Adèle et Constance grandissent. D’enfants, elles deviennent jeunes filles. Elles commencent leurs études littéraires. Leur père les dirige de loin dans ces études. 1! leur indique de fortes et solides lectures. Il recommande à Adéle de lire, à cause de leur célébrité, l'Iliade et l'Odyssée, ces sublimes balivernes, comme il les appelle, la Jérusalem délivrée, et surtout, sur-
tout «notre amie commune » — lui ditil — madame de Sévigné. « Je te déclare d’avance très so« lennellement >» — ajoute-t-il — «qu'il me sufit
« que tu écrives comme elle; je ne suis pas comme « ces gens qui ne sont jamais contents » (1).
Adèle ne montre bientôt que trop d’ardeur pour ces études. Son père s'applique à modérer son zèle. Il la prêche doucement d'abord, lui recommande af fectueusement de ménager ses forces et sa santé, de se jeter, chaque jour, « dans le fauteuil douillet de « l'ignorance », de faire tous ses efforts pour « dere« nr sotle jusqu'à un certain point » (?). Lorsqu'il s'aperçoit que ses exhortations sont inutiles, qu’Adèle se jette à corps perdu dans la littérature, qu'elle abandonne, pour ses livres, les travaux à l'aiguille
() Il peut être intéressant de remarquer ici que Joseph de Maistre, tout en admirant plus que personne l'incomparable lalent d'écrire de l'aimable marquise, n'hésilait pas à lui préférer et de beaucoup, pour la solidité du caract sa fille, madame de Grignan. ais eu à choisir entre la mère et lu fille, disait-il spirituellement, j'awrais épousé la fille, et puis je serais parti bien vite pour recevoir les lettres de la mère.
(2) 1 lui demande aussi de se souvenir de l’adage de madame de Sévigné: Bella cosa far niente. Autrement , — dit-il — “ tu L'effileras, et tu “ ne seras plus qu'un petit bâton raisonnable, raisonnant ou raisonneur, # ce qui me fâcherait beaucoup. ,