Les serviteurs de la démocratie

ARMAND BARBÈÉS 491

d’une indicible douleur de vaincu, et j'ai refusé tant que je l'ai pu, pendant deux jours, de quitter ma prison.

» Je viens maintenant ici pour parler de plus près, et mieux me faire entendre:

» Qu'importe à qui n’a pas droit sur moi que j'aime ou non mon pays ? Oui! la lettre qu'on a lue est de moi, et la grandeur de la France a été, depuis que j'ai une pensée, ma religion.

» Mais, encore un coup, qu'importe à qui vit loin

de ma foi et de ma loi que mon cœur ait ces senti.

ments? Décembre n'est-il pas là, el pour toujours, un combat indiqué entre moi et celui qui l’a fait?

» À part donc ma dignité personnelle blessée, mon devoir de loyal ennemi est de déclarer à tous et à chacun ici que je repousse de toutes mes forces la mesure prise à mon égard.

» Je vais rester à Paris deux jours pour qu'on ait | temps de me remettre en prison, et ce délai passé vendredi sojr — je cours de moi-même chercher l'exil.

» À. BarBès.

» Paris, le 11 octobre 1854, dix heures du matin, »

III

Barbès, comme il l’annonçait dans cette lettre au Siècle, lettre digne des héros de Plutarque, courut chercher l'exil. Il se fixa chez un peuple libre, laborieux et hospitalier, en Hollande, à la Haye. Cest là quil nous a été donné de serrer une dernière fois ses loyales mains,