Lettre inédite d'Étienne Dumont sur quelques séances du tiers état : mai 1789

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21 Bureau sont fort maltraités; — violente dispute pour savoir si les con férences doivent avoir lieu avant ou après la députation; — point de registres, rien d’écrit ! Recours aux notes des particuliers, dont plusieurs attestent que le second amendement porte après, — violent tumulte ; tous veulent parler et personne ne veut écouter : il semble que l’état d'attention soit un état de souffrance pour les Français, que le bruit, l'insubordination soient l’état naturel de l'assemblée. Note de mon papier : je n'entends que des bruits confus, avant crie l'un, après crie l’autre, avec, avant, après, non ! Messieurs, c'est avant et je le prouve; — eh ! non c’est

après, vous.dis-je ; — point du tout, c'est avec, écoutez-moi.— L'oura- ‘

gan continue. Enfin le bruit s’apaise un peu et unehonne voix! commande un moment l'attention. « D'où vient tout cet embarras, Messieurs ? de ce € que nous n'avons point de procès-verbal de nos délibérations, mais « enfin nous pouvons juger par l’objet même de la députation et de « l’Adresse au Roi qu'elle doit avoir lieu avant les conférences, puisqu'il « s'agit d'informer Sa Majesté que la reconnaissance qui nous les fait « accepter ne nous fera point écarter du principe de l'union entre les « trois ordres, et que toute décision contraire à ce principe serait une « violation de nos mandats. » Il parla fortement et n'eut d'autre défaut que de se précipiter trop, parce qu'il craignait sans cesse d’être interrompu. Du Pont se lève et réfute cet avis en disant que l'Adresse au Roi ( qui n’était pas faite — jugez quel champ on avait pour raisonner de ce qu'elle contiendrait ou ne contiendrait ‘pas !) que celte Adresse n’avait pour objet que de porter à Sa Majesté le sentiment des Communes et non pas de limiter, d’assigner des conditions aux conférences, que, par conséquent, elle n’était pas nécessairement préalable ; qu’il serait indécent aux Communes de rétracter le message que l’on venait d'envoyer au Clergé et de jeter du blâme sur le Doyen dont la lettre au Garde des Sceaux n'avait pas exprimé le temps de la députation. — Il fut mal accueilli; tumulte extrême : les uns veulent qu'on aille aux voix pour décider, les autres ne le veulent pas! Si ce n’étaient des Français, on croirait, au bruit, qu'ils vont s’égorger. Un tel vacarme dans la chambre des Communes Anglaises annoncerait une guerre civile. Quelqu'un ouvre un avis coneiliatoire : « c’est que les commissaires se rendront aux con« férences, mais ne les termineront pas avant que le Roi ait recu la dé« putation. » Cet avis passe par acclamation. Personne ne demande si cette condition est en leur pouvoir ? si la conclusion d’une conférence ne dépend pas de celui qui la préside? si leurs commissaires resteront en place quand les autres se seront retirés ?

1 Celle de Mirabeau.