Louis XVI et la Révolution

LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 167

précipité dans un seul lit toutes les eaux tombées dans les plus petits vallons, baïssant à leur tour, le fleuve, un instant souillé par les boues qui dorment au fond de toutes les rivières, reprend avec sa placidité la pureté de ses eaux. Mais si, par quelque erreur imprudente des chefs, on essaye de contenir trop longtemps et trop étroitement la masse accrue des eaux, si au besoin on ne se résigne pas à des sacrifices nécessaires, ce n’est plus la crue qui passe, c’est l’inondation furieuse, qui couvre tout, et laisse après elle un pays dévasté et souillé. C’est là toute l’histoire de la Révolution française à ses débuts, ce qu’elle a été, et ce qu’elle aurait pu être. Rendons à chacun ses responsabilités ; on les a trop longtemps rejetées sur le tiers qui fit tout, au contraire, pour amener pacifiquement la renaissance de la patrie. Disons-le bien nettement: le grand responsable, le grand coupable, c’est Louis XVI, dont le moindre tort fut cette inintelligence qui le mettait audessous de sa situation, difficile, mais non désespérée. Ses concessions du 23 juin venaient trop tard, et Mirabeau avait le droit de répondre, au nom de la France, à l’ultimatum royal : « J'avoue que ce que vous venez d’entendre pourrait être le salut de la patrie, si les présents du despotisme n'étaient pas toujours dangerenx. Quelle est cette insultante dictature? l'appareil des armes, la violation du temple national pour vous commander d’être heureux? Qui vous fait ce commandement? Votre mandataire. » Ce seul mot était le commencement de la déchéance : le roi n’était plus que le mandataire des députés du peuple. La Constituante le lui fit bien voir.