Louis XVI et la Révolution

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178 LOUIS XYI ET LA RÉVOLUTION.

frères est une belle et bonne chose. Ils applaudissent, sans distinction de partis, un ami qui vient plaider la cause de son ami, et qui répond de lui corps pour corps. Le 25 juin, on aceuse M. de Lautrec d’avoir trempé dans la contre-révolution, d’avoir répandu de largent; le marquis d’Ambly vient le défendre, et termine ainsi son discours : « S'il arrivait un courrier extraordinaire qui nous annonce que M. de Lautrec est à la tête de quinze cents gentilshommes ou autres, je dirais : Oui, cela se peut. Mais des menées sourdes.… Lautrec!.. cela n’est pas possible. Je n'ai plus qu'un mot à dire; quand Lautrec est parti, il vous a dit : « Soyez tranquilles; je vais « chez moi, et vous pouvez être sûrs que je dirai du bien même « du côté gauche. » Souvenez-vous de cela; Lautrec est infirme, vous le savez tous; il ne peut pas marcher, il va aux eaux; ilen à besoin. Je vous le demande, je la demande cette grâce, de tout mon cœur : qu'il aille aux eaux, et je me constitue prisonnier. — Ge discours est à chaque phrase interrompu par les applaudissements universels de l'Assemblée. » L'amitié leur paraît un sentiment si respectable, que Foucault l’invoque pour se disculper d'avoir aidé un prisonnier dans son évasion, et qu’il pose ce principe : toute maison d’un homme sensible doit devenir un temple. Pour arrêter l'effet d’un pareil argument, Robespierre se croit obligé de distinguer entre le simple prévenu, que l'on doit protéger, et le criminel de lèse-nation, dont l'amitié même doit se désintéresser. La sensibilité est une circonstance atténuante pour les emportements. Le marquis de Baraudin fait oublier des paroles un peu vives en donnant à l’Assemblée cette excuse : elles sont échappées à sa sensibilité. Les nerfs de la Constituante sont à la merci de toute émotion un peu forte : les larmes l'émeuvent. Le 10 novembre 1789, le président du parlement de Normandie plaide pour ses collègues menacés : « Des magistrats livrés à la fureur du peuple, fugitifs, expatriés, séparés de leurs familles désolées… » À ces mots, l’orateur verse des larmes;

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