Mémoires du général Baron Roch Godart (1792-1815)

18 MÉMOIRES DU GÉNÉRAL GODART

cherchant qu’à exciter ses soldats à l'insurrection, que je fus forcé ‘de sévir avec rigueur contre lui. Je fis part de sa conduite au ministre de la guerre et à l’inspecteur général, et je reçus aussitôt de ce dernier l’ordre de le suspendre de ses fonctions, et de le faire remplacer provisoirement par le plus ancien capitaine de son bataillon, jusqu'à ce que le gouvernement en eût décidé autrement.

Dans ce temps, on préparait à Brest l’expédition de Saint-Domingue. Comme je devais y fournir un bataillon ', je profitai de cette circonstance pour faire réintégrer le chef de bataillon Tréboutte dans ses fonctions, et le faire partir pour Brest. Il n’y eut pas sortes de manœuvres qu'il n’inventât pour soulever alors les soldats de son bataillon contre moi, notamment à Hennebon, où ce bataillon fut passé en revue par le général de brigade Roulland ', qui me seconda parfaitement, et en présence duquel je répondis et fis droit à toutes les réclamations qui me furent faites.

Ce bataillon, habillé et soldé de tout ce qui lui revenait, partit enfin d'Hennebon ! non sans quelque difficulté, car je fus obligé de destituer deux sergents ce même jour-là, et de les faire conduire, ainsi que plusieurs autres mauvais sujets, par la gendarmerie jusqu’à destination. Plusieurs individus du bataillon s'étaient, m'a-t-on dit, présentés dans ma chambre le matin, soidisant pour me faire leurs adieux. Je me suis toujours félicité que le hasard m’ait assez favorisé pour ne m'y être point trouvé, car j'ai toujours soupçonné que ces malheureux en voulaient à mes jours.

Après le départ de ce bataillon, mon régiment fut

V. AY, aux notes.