Napoléon Ier et le Roi Louis : d'après les documents conservés aux archives nationales
XLVIIT NAPOLÉON I ET LE ROI LOUIS.
sent à nous entourer d’espions et à faire des fables, ont pris leur souhait pour la vérité. Cet article délicat, Sire, V. M. le sait, me touche sensiblement au cœur. V. M. doit me ménager sur ce point et m'épargner de pénibles sensations.
« V. M. dit qu’an roi commande, ordonne et ne demande pas. Cependant ce n’est pas ce que V. M. fait, et elle ne reçoit rien que par le consentement du corps législatif (1). D'ailleurs, Sire, V. M. sait que, depuis mon arrivée, les contributions sont augmentées de vingt et un millions tournois, que les sources de la prospérité des particuliers se sont taries ou sont fort diminuées. Sire, si la nation ne connaissait pas parfaitement mes bonnes intentions pour elle, si sa confiance n’était pas entière et justifiée par mon caractère, j'aurais été déjà lapidé sur la place publique. V. M. me rendra la justice de penser que, pendant les autres années, non-seulement la Hollande ne lui a fourni que huit à neuf mille hommes, mais qu’elle occupait, pour la garder, un corps de troupes considérable. Aujourd’hui elle a vingt mille hommes en campagne, et pas un Français dans son intérieur (2). »
Napoléon était à ce point mécontent de ce qui se passait en Hollande qu'avant de connaître la réponse de son frère, il lui adressait une autre lettre (3) presque aussi longue que la première et qui n’en était guère que la répétition. L’explication que, dans l’intervalle, il avait reçue au sujet du rétablissement
(1) On est tenté de se demander si cette remarque ne cache pas une ironie; car il est difficile d'admettre que Louis portât la naïveté au point de croire à ce qu’il disait des rapports du corps législatif et de l’empereur. En tout cas, Napoléon prit cette remarque au sérieux. € Je suis fâché, dit-il, dans une lettre du 25 avril (p. 113), que vous ne distinguiez pas entre ce que c’est que faire faire une quête à des particuliers, ce qui est peu digne d’un roi, et demander pour les besoins de l'État la sanction d’un corps qui représente la nation. »
(2) Louis à Napoléon, 16 avril 1807, p. 108-110.
(3) Napoléon à Louis, 19 avril 1807, p. 111, 112.