Oeuvres diverses
RU
qué, mis à prix, Marat poursuit son œuvre, invisible et vengeur aux flancs de ses ennemis.
La plèbe frappe du pied le sol, et l’homme des ténèbres a surgi. Il parle au 10 août par la voix du tocsin, il parle en septembre et se jette en héros sur ce groupe de clinquant dont sa hideur est le contraste, philosophes et bourgeois républicains avides d’accaparer au profit de leur caste les conquêtes de la Révolution.
Un moment, le hardi lutteur semble perdu dans la tourmente : « À l'Abbaye! à la mort! » crie la Gironde. Imprudents ! ils creusent la fosse qui les engloutira, d’où leur ennemi ressort transfiguré dans la gloire.
Son front hâve, ceint de laurier comme le front des Brutus et des Scipions, le tribun des souffrances populaires, drapé dans sa toge sordide, s'avance porté sur les bras et acclamé par les cris de cent mille misérables: c’est leur jour, éclairé d’un beau soleil d'avril. La repoussante livrée du travail, pauvre et honteux jouet des sarcasmes, le labeur infime, vautour quotidien des poitrines affamées, tout un monde de déchéances triomphe avec l’Ami du peuple. Et l’orgueil des palais, le dédain des richesses, les faciles succès de l'intelligence ont pâli devant la guenille triomphale de Marat.
Alors un frémissement de joie dut agiter ce corps épuisé de privations et de veilles : et les blessures du passé, attaques ignobles de la calomnie, outrages, injures, mépris, tout s’évanouit dans l'immense bonheur.
Amer réveil. La maladie attend le trromphateur. Cependant la Vendée élève son nuage rougeûtre, la trompette des coalisés sonne à la frontière : la trahison creuse sa sape souterraine. Marat ne peut trouver de repos que dans la mort. Cloué à son