Oeuvres littéraires : ouvrage orné d'un portrait
236 ÉLOGE D'ATHANASE AUGER
cours pour prolonger ici le récit seul des travaux de l'abbé Auger. L’infatigable éditeur de plus de deux cents chefs-d’œuvre trompe le zèle de son panégyriste, comme il trompa M. le Beau luimême. « Vous auriez besoin de la vie de six « hommes », lui disait un jour ce professeur célèbre, qui devait pourtant s’effrayer moins qu'un autre des longs ouvrages, cet homme qui écrivit pendant soixante ans, et dont la main défaillante traçait encore des lignes sur son lit de mort. «Non, répondit Auger, je promets d'y suflire » ; et vous voyez s’il a tenu parole.
En effet, il n’appartenait qu’à celte seule idée; les passions les plus enivrantes ne s'emparent pas plus exclusivement du cœur qu’elles dominent, que le sien n’était maîtrisé par les orateurs, par Démosthène, par Cicéron. Un jour, sur les bords dela Seine, dans une retraite champêtre, où j'avais eu le bonheur de le recevoir, la promenade nous conduisit, avec quelques autres amis de l’éloquence, sur les hauteurs d’une colline aride où vivait seul un vieux ermite ignoré de la nature entière. Après quelques questions insignifiantes que chacun de nous se lassa bientôt de faire au déserteur de l'humanité, et au mo-