Orateurs et tribuns 1789-1794

270 ORATEURS ET TRIBUNS.

lorsqu'ils m'arracheront la vie, ils croiront tuer un homme de trente-deux ans; eh bien! j’en aurai quatre-vingts, car je veux vivre en un jour pour dix années, » Voilà bien la devise des épicuriens de la pensée ou de la matière : mettre dans un jour dix années d’idéal, dix années de plaisirs intellectuels ou sensuels.

C’est lui qui préside la Convention, le 2 juin, lorsque Henriot la cerne à la tête de ses canonniers et réclame la mise en arrestation des Girondins proscrits ; il commande vainement qu'on saisisse ce rebelle et guide ses collègues dans cette honteuse promenade qu'ils firent aux Tuileries et au Carrousel pour qu’on crût à leur liberté. C’est encore lui qui, le 10 août 1793, préside la première fête nationale et met le feu au bûcher où se trouvaient entassés les emblèmes de la royauté : couronne, manteau royal, armoiries, écussons, et ce trüne que Napoléon définira plus tard : quatre planches recouvertes de velours.

La vertu, j'en conviens, n’est qu'un vain mot, dit Pope, mais faut-il perdre la dignité du vice? Hérault Va senti, et à défaut de dignité, il ne perdit jamais l'élégance du vice. Ses maîtresses s'aiment en lui ou du moins se tolèrent à cause de lui; il leur fait porter ses couleurs, le jaune et le violet, écrit à l’une d'elles, au moment de partir en mission secrète pour le Mont-Blanc : « Adieu, Suzanne, allez quelquefois à l’Assemblée en mémoire de moi. Adieu. Les chevaux