Portalis : sa vie, et ses oeuvres
LE CODE CIVIL 213
cette opposition imprévue et intempestive !. Après avoir un moment songé à un coup d'État, il retira, d’après le conseil de Cambacérès, tous les projets de loi en discussion et réduisit ainsi les assemblées délibérantes à une complète inaction. Cette démarche significative et une allocution un peu vive suffirent pour ramener le Sénat. Peu de jours après, par une interprétation habile de la Constitution, Cambacérès obtint du Sénat que le renouvellement du premier cinquième du Corps législatifet du Tribunat, qui devait avoir lieu à une époque indéterminée de l’an X, s’effectuât immédiatement, et qu’au lieu de tirer au sort les noms des membres sortants, le Sénat les désignât lui-même et choisit les chefs de l'opposition.
Cette mesure, d’une légalité contestable et d’une moralité plus qué douteuse, eut, dansle moment même, les meilleurs résultats. Le Corps législatif et le Tribu nat épurés cessèrent de retarder l’accomplissement des grands projets médités par le Premier Consul : le Con-
4. Son irritation fut vive, à la suite du rejet du Titre préliminaire; l'histoire en a conservé l’expression : « Que voulez-vous faire, » s’écriait-il, avec des gens qui, avant la discussion, disaient que » le Conseil d’État et les Consuls n'étaient que des ânes, et qu’il » fallait leur jeter leur ouvrage à la tête? Que voulez-vous faire » quand un esprit tel que Siméon accuse une loi d'être incom» plète, parcË qu'elle ne déclare pas que les enfants nés de Fran» çais dans les colonies sont Français... J'ai lu le discours de Por» talis au Corps législatif, en réponse aux orateurs du Tribunat ; 1 » ne leur a rien laissé à dire, il leur a arraché les dents. Mais, » quelque éloquent qu’on soit, parlät-on vingt-quatre heures de » suite, on ne peut rien contre une assemblée prévenue, qui est » résolue à ne rien entendre. » (Thiers, Histoire du Consulat et de l'Empire, tome I, livre XIII.)