Portalis : sa vie, et ses oeuvres
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représentatives la garantie de toutes les libertés. Il n’avait pas cet élan patriotique et ce prestige de l’éloquence, qui, à défaut de science politique, avaient un moment entraîné, à la suite des Girondins, l’Assemblée législative et la France. Il ressemblait encore moins à cette formidable Convention, dont on doit sans doute détester les crimes, mais qui, dans le lointain où elle s'offre à nos regards, nous apparaît entourée d’un prestige étrange et d’une incontestable grandeur. Les orateurs révolutionnaires, ces tribuns de génie dont la parole emphatique et vibrante avait donné le signal de la lutte, n’étaient plus là pour enflammer les passions et ranimer les courages. À peine gardait-on le souvenir de Mirabeau; Vergniaud ne tenait plus les esprits et les cœurs sous le charme de ses accents passionnés; Camille Desmoulins n’accablait plus ses adversaires des traits de son amère et sanglante ironie; du haut de la Montagne, la voix tonnante de Danton ne dictait plus, au jour du danger, des résolutions audacieuses jusqu’au crime; Robespierre ne venait plus à la tribune prononcer des harangues ampoulées et couvrir du nom de vertu ses terreurs, ses ambitions et ses haines hypocrites.
Le temps de ces convulsions était passé. L'irrésistible enthousiasme qui avait conjuré les suprêmes périls de 1793 n'existait plus qu’à la frontière et dans les camps; à l’intérieur, l’exaltation des premiers jours avait disparu avec la menace de l’invasion étrangère. La constitution du clergé, la réquisition, les assignats,