Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

INTRODUCTION. 1

de Cazand , qui était nécessaire à l'investissement du fort. Ils y abordèrent sous le feu de nombreuses batteries, s’en rendirent maîtres, et la garnison du fort de l’Ecluse capitula.

Pichegru poursuivait le duc d'Yorck , et battait son arrière-garde chaque fois qu’il pouvait l’atteindre ; il le forcait de laisser à découvert plusieurs places importantes. Le fort d’Orten et celui de Crévecœur furent emportés. On s'attendait à une longue résistance de la part du commandant de Bois-le-Duc. Il avait eu recours aux inondations ; il capitula avant que le siége fût commencé. IL s'agissait ensuite d'investir Nimégue, Grave, Venloo. Dans ce dessein, l’armée du Nord passa la Meuse presque sous les yeux du duc d’Yorck, qui n’osa point l’en empêcher, qui fut atteint sur l’autre rive, et qui, vaincu par un léger combat, ne se crut plus en sûreté que derrière le Wahl. Des trois villes hollandaises qui furent investies en même temps, Grave fut la seule qui opposa une sérieuse résistance.

Les rigueurs de l’hiver se faisaient déjà sentir. L'armée du Nord était livrée aux plus affreux besoins, ayant derrière elle les greniers de la Belgique , et devant elle les trésors et les magasins de la Hollande ; elle voyait sortir, des forteresses dont elle s’emparait, des garnisons exténuées par la faim. Les préparatifs de la grande expédition avaient demandé quelque temps. Une maladie du général Pichegru l'avait encore fait différer. Enfin on va sortir de cette situation embarrassante : tout est prêt; Pichegru a arrêté ses plans, mais ils sont subordonnés à la température du ciel. Le froid redouble (l'hiver de 1794 à 1795 fut un des plus rigoureux de tout le siècle) : point de tentes à élever , point de forêts à abattre. Il n’était personne en France qui ne frissonnât en songeant à cette armée, qui avait àla-fois à désirer et à braver un froid glacial, que quelques jours pouvaient porter sur des routes nouvelles, et que quelques heures d’une température plus douce pouvaient englontir sous les eaux. À moitié nu , sur des plaines de glace, le soldat français chantait. Le 9 thermidor lui avait rendu sa vive et franche gaïté. Une profonde terreur s'était emparée du stathouder et de ses partisans. Aidé des Anglais, il pouvait encore opposer une armée à peu près égale à celle des Français , qui se montait à près de cent mille hommes. 1] lui restait encore une longue ligne de forteresses , mille défenses faites par la nature, enfin la ressource du désespoir, linondation des campagnes. Mais il gémissait d’appeler en vain pour la défense de son pays ces Prussiens qu’il avait appelés jadis pour la défense de