Récits des temps révolutionnaires d'après des documents inédits

206 RÉCITS DES TEMPS RÉVOLUTIONNAIRES.

il eût été facile de prévoir ce qui se manifesta hautement bientôt après. Comme il m'était impossible, malgré les plus constants efforts, de réprimer les marques publiques d'intérêt et de reconnaissance que me donnait mon maître, chaque instant irritait davantage Mme de Balbi qui, me jugeant par ellemême, n’imaginait pas qu’il pût être loin de moi de vouloir dominer; qui, oubliant un caractère dont je ne m'étais jamais démenti, se persuadait sans doute que j'allais empiéter sur ce qu’elle regardait comme ses droits, et que je n’aurais d'autre but que de détruire peu à peu sa faveur. »

Voilà donc la guerre déclarée entre la maîtresse et le favori. Vainement, d'Avaray cherche à en prévenir les effets et s'attache à défendre en toute occasion son ennemie contre les traits acérés que lui décoche la malignité publique; tout est inutile et, bientôt, il se voit dans la nécessité de résister ouvertement à la créature altière et jalouse « qui ne supporte pas que la pensée de Monsieur soit pour une autre qu'elle ».

Au milieu de « la tourbe de Coblentz » il a distingué une jeune femme « douce, modeste, timide, pleine d'esprit et de grâce »: il lui a donné son cœur. Monsieur, « parce qu'elle était aimable