Récits des temps révolutionnaires d'après des documents inédits

214 RÉCITS DES TEMPS RÉVOLUTIONNAIRES.

qu’en dépit du mystère et de la mode‘, le secret était celui de tous au bout de quatre mois. »

Ce que fut l’indignation du fidèle serviteur de Monsieur, à la nouvelle de l'événement, il est encore plus aisé de se le figurer que de le décrire. Le marquis de Jaucourt fut seul à n’en point paraitre irrité. Fidèle au souvenir des anciennes bontés de Mme de Balbi pour lui, il était toujours en servitude, qu'elle fût près ou loin, et toujours sous le charme. Il traita les propos recueillis à Vérone de calomnies abominables, qu’il fallait mépriser et qui ne valaient pas qu’on troublât la quiétude de Monsieur en l’en entretenant. Mais les autres personnages qui entouraient le prince, et d’Avaray surtout, prirent la chose plus au tragique. [ls voyaient déjà leur maître « associé de la manière la plus choquante au ridicule et aux sots propos dont on ne manque jamais de couvrir une pareille aventure ». Ils eussent voulu l’avertir; mais aucun d’eux ne se sentait de force à le faire. D’Avaray, mieux placé pour prendre auprès de Monsieur une initiative salutaire, se faisait « un

1. « Les femmes, à cette époque, se faisaient un ventre quand la nature ct les circonstances ne les en avaient pas pourvues. » (Annotation de la main de d’Avaray sur son manuscrit.)