Récits des temps révolutionnaires d'après des documents inédits

218 RÉCITS DES TEMPS RÉVOLUTIONNAIRES.

pardon de mon audace; je suis hors de moi. Est-ce donc là ce que vous appelez une amie? Voilà donc la récompense de vingt années d’affection! Au moment où tout vous accable, où le dernier de vos ennemis, le plus faible de vos alliés, où votre parti même se plaît à ruiner votre con.sidération, une femme perdue, la fable de l'Europe, insulte à vos malheurs et vient souiller votre retraite! Non, vos serviteurs ne le supporteraient pas. Je ne sais le parti que prendront ces messieurs. Mais, écoutez le serment que je fais : si Mme de Balbi met le pied dans cette maison, je pars le lendemain. Votre gloire avant tout, votre faveur après. »

Pendant que je parlais, mon malheureux prince était abimé dans la douleur, tour à tour réveillé par la hardiesse de mon langage et la force de mes raisons. Je le voyais, si ses mains découvraient un instant son visage, rougir et pâlir à la fois. À peine pouvais-je prévoir ce que j'avais à attendre, lorsque d’un ton de voix déchirant, il me dit :

€ Ah! mon ami, ne m'accablez pas.

— Ce serait vous trahir que vous épargner.

— Par pitié, laissez-moi. Mon cœur brisé ne