Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

REG —

Juge assisté de l’auguste vérité, qui rendra à chacun ce qui lui sera dû.

J'invite ceux qui ont détaché une phrase d'une de mes brochures intitulée: — Mémoire sur une contribution extraordinaire et sur l'établissement d’un Mont-de-Piété. Samedi 25 Janvier 1794, et qui ont colporlé cette phrase isolée pour avoir le droit de la rendre odieuse, de se donner la peine de lire cet opuscule en entier ; peut-être qu'après cette lecture, que la plupart n'ont certainement pas faite, et se reportant au temps où il fut écrit, ils me jugeront avec moins de partialité; d’ailleurs, j'invite aussi ces mêmes personnes à considérer que lors même qu’on a prétendu envisager cette phrase, méchamment isolée, comme une menace faite aux riches et aux propriélaires, cependant, au mois d'Avril suivant, c'est-à-dire trois mois après la publication de ma brochure, le Conseil Général usant de sa pleine et entière liberté, refusa le projet de loi sur les finances et les impôts qui lui fut présenté, sans s'embarrasser de cette soi-disant menace. Il eut été à souhaiter que cette phrase tant reprochée, eût produit l'effet d’une menace ou celui d’un funeste pronostic, parce que dans ce cas l’Assemblée Souveraine, acceptant ce projet de loi d'Avril 1794, aurait donné au Gouvernement les moyens de cheminer; ainsi on aurait Ôté au peuple tout prétexte de s’insurger, et l'administration aurait eu dans ses mains des moyens suffisants pour prévenir les malheureux événements dont nous avons été les témoins. Ainsi je demeure convaincu que, sans le rejet du projet de loi précité, l'insurrection n'aurait pas eu lieu. Il était donc contradictoire, d’un côté, de dire que ma phrase était une menace dirigée contre les riches et les propriétaires, de l’autre, d’agir comme s'il n’y avait point eu de menace; et voilà comme trop souvent l'esprit de parti aveugle les hommes. Je le répète, en faisant cette brochure je n'avais que de bonnes intentions ; mon but était celui de tout bon citoyen, el j'appelle de son contenu à Dieu et aux hommes impartiaux.

Minutes de BINET notaire, 1820.