Six lettres inédites de Gustaf Mauritz Armfelt à Francis d'Ivernois

B VIII: Lettres de G. M. Armfelt 19

communication entre nous m'a bien souvent contrarié. Les papiers publics qui se sont occupés de moi depuis le changement de Dynastie en Suède, n’ont eues pour but que d’embrouiller la vérité en disant des bêtises. Le gouvernement françois si affairé d’ailleurs, n’a pas dédaigné de me nuire et si le Bon d’Alquier! n’étoit pas un agent très avare et mesquin, j'aurois peut être eu le sort du malheureux Comte de Fersen? — il faut avouer que le grand Bonaparte est bien petit dans ses haines particulières et que ses Elèves sont gauches dès qu'ils n’ont pas l’ordre exprès d’assassiner ou de voler l’argent ou la réputation des gens.

Les nouvelles que vous avez la bonté de me donner, Monsieur, de mon fils, m’enchantent — j'ai laissé à l'abbé, il y a longtemps, pleine liberté d'aller en Ecosse achever son Education, bien persuadé que cela est le mieux. Mais come il y a mille difficultés et pour les lettres et pour les lettres de change, il est possible que ces circonstances particulières l’ont retardées pour le moment.

Mon fils ainé*, auquel vous avez bien voulu prendre quelque interet, vient d’être placé à l'Etat Major de l'Empereur, il faut donc encore sa permission pour aller servir dans l’Etranger, si même j'eus le bonheur d’obtenir la protection du Gouvernement Anglais, pour qu’il fut placé dans l’armée Espagnole ou Portugaise. Si on tarde encore longtemps à faire la guerre ici, mon fils quittera, ou aura la permission d’aller servir la cause la plus honorable qui aït jamais existé, et j'espère par vos bontés qu'on lui ferra avoir quelque place de Gallopin auprès d’un Général quelconque en activité. Sa conduite Militaire et la Destinée ferront le reste.

! Charles-Jean-Marie, baron d’Alquier, 1752-1826, ministre plénipotentiare de la France à Stockholm de 1810 à 1811. C’est surtout lui qui réussit à discréditer Armfelt auprès de Bernadotte.

2 Jean-Axel, comte de Fersen — l’ami de Marie-Antoinette — avait été assassiné, le 20 juin 1810, par la populace de Stockholm, qui l’accusait d’avoir empoisonné le prince héritier Charles-Auguste d’Augustembourg.

5 Gustaf Magnus Armfelt; il sera plus tard général russe et gouverneur de la province finlandaise de Nyland.