Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits
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laisse les énormes dogues chargés de la police de la geôle. L’huissier bredouillait la sentence, s'arrêtait à chaque nom, et brusquement la déchirante séparation s’opérait : il y avait dans ces formalités brutales un raffinement dont s’augmentaient les cruautés de la mort. Les douze prévenus dont l'acquittement allait être prononcé furent ainsi subitement arrachés aux derniers embrassements de leurs compagnons. Cette sélection instruisait ceux-ci de leur sort.
On dit qu'après avoir entendu lecture de l'arrêt qui les renvoyait des fins de la poursuite M°* de Virel et d’Allerac ne pouvant plus conserver aucune illusion sur la condamnation de leur jeune sœur M°"° de la Fonchais, furent prises d'une crise de désespoir si poignant, qu'attirés par leurs cris dans la salle de délibérations, trois des jurés qui venaient de rendre le terrible arrêt s'empressèrent à leur faire reprendre leurs sens.
— Ayez du courage, Mesdames, disaient-ils, votre religion doit vous en imposer et vous fournir aussi des consolations!.
Tandis que cette lamentable scène se passait dans les coulisses du Tribunal, comparaissaient devant les jurésle jardinier Perrin et lemédecin Le Masson : celui-ci bénéficiait des privilèges de sa profession;
1. Journal de Rennes, 1841, d'après les souvenirs des membres survivants de la famille Desilles.