Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

LA CONJURATION BRETONNE 69 lent; jovial, d’ailleurs, d’une gaîté et d’une bravoure communicatives, adoré de ses hommes et estimé de ses adversaires à ce point qu’au cours des dernières luttes, en 1800, Brune lui offrit, sans succès, au nom du Premier Consul, le grade de général de brigade dans les armées de la République.

Parmi les premiers adhérents de la conjuration, on doit encore citer le chevalier de Tinténiac, qu'une affaire galante avait obligé de quitter la Marine, où il servait en qualité de lieutenant: il remplissait l’office d'intermédiaire entre les Bretons, les Vendéens et les émigrés de Jersey et d'Angleterre; s’embarquait, débarquait en dépit des surveillances, traversait les campements ennemis sans prendre mème la précaution élémentaire de revêtir un déguisement ou de se munir d’un faux passeport. Juif-errant de l'association, il courait de Cholet à Saint-Malo, d'Alençon à Nantes, parcourant, à pied, vingt lieues en une nuit, traversant la Loire à la nage, pris pour un bleu par les chouans, risquant d’être fusillé comme espion à chaque embuscade. À ceux qui lui conseillaient quelque ménagement, ilse disait heureux d’expier, au prix de tant de fatiques, les erreurs de sa jeunesse. Il fut enfin tué, le 18 juillet 1795, au chäteau de Coëtlogon: il n'avait pas trente et un ans.

Les deux frères de Lahaye-Sainte-Hilaire ne lui cédaient pas en abnégation et en audace.