Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt

IV

19 novembre.

J'ai passé plusieurs après-midi au Musée central des Arts qui abrite des trésors de peinture et de sculpture. On doit regretter que la lumière venant «tes deux côtés, par les fenêtres, soit aussi peu favorable aux tableaux. Il est impossible de juger une grande toile d’un coup d'œil d'ensemble; il faut absolument changer de place, à plusieurs reprises, afin d'apprécier les différentes parties sous leur vrai jour. La salle d’entrée, qui sépare la galerie des tableaux des cabinets des dessins, est la seule où la lumière tombe d’en haut. On avait projeté de disposer de même la grande galerie; mais ce serait une dépense de plusieurs millions et l’on n’en parle plus.

Le classement des tableaux, par école et par maître, a plus de mérite au point de vue de l’histoire de l’art, qu'au point de vue de l’agrément du public. En pénétrant dans la galerie, on trouve d’abord les œuvres des grands peintres de l’ancienne école française : Lebrun, Poussin, Lesueur, attirent l'attention; Vernet, le grand peintre de marines, a plusieurs belles toiles ; pour Claude Lorrain, à l'exception d’un merveilleux coucher de soleil (1), j'ai vu ailleurs de plus beaux produits de son pinceau.

(1) Un port de mer au soleil couchant, signé : Craupro. Ixv. Rouæ, 1639.