Une mission en Vendée, 1793

396 UNE MISSION EN VENDÉE, 1793.

sans ordre, mais tres serrés jusqu'a dix heures du soir. Il en arriva successivement le reste de la nuit le vendredi et le samedi. Cette armée peut être composie de cent à cent vingt mille hommes, à soixante à soixante-dix pièces de canon, deux de douze, trois de huit, le surplus de quatre; le tout en fonte, et plus de caissons qu’il ne leur en faut.

La seconde armée composée de viron quarente à cinquante mille homme arriva dimanche dernier jour de seconde decade, comença a defiler depuis le matin. Il ne finit que le lundi au soir. Cette seconde armée est composée de cavaliers, canons, infanterie, hommes agés, femmes et enfants. La plus grande partie de cette armée de brigands est armée de fusils, pistolets, sabres, piques et faux. Il paroit qu’elle ne manque pas de munitions de guerre. Il y a beaucoup d’Allemands, Anglois, Prussiens, etc. qui disent avoir été faits prisonniers de guerre et s'être rendus parmi eux. Ils ne manquent pas de generaux. Stofflet, le premier qui les ait comandés, paroît avoir le plus leur confiance. À leur suite sont des comissaires chargés de s'emparer des caisses publiques; beaucoup de nobles, tant vieillards, femmes et enfants, suivent cette armée ainsi qu'environ quatre mille femmes avec leurs enfants. Il peut y avoir a peu près deux cents prêtres non assermanlés et surtout Guillot de Folleville de St-Malo, ci-devant curé de Dol et actuellement se disant éveque d’Agra et ayant des pouvoirs du pape en la province de Bordeaux.

Cette sainte armée vit à la grâce de Dieu, prend tout ce qu’elle croit lui être bon, après avoir volé des portefeuilles, des montres, pris les armes des citoyens, brûlés les habits nationaux qu'ils ont pu trouver. Elle a pillé toutes les maisons sans distinction, pris le froment, le bled noir, l’avoine, le foin, le cidre, vin et eau de vie, tant dans les villes que dans les campagnes. Ils se sont étendus jusqu’à St-Benoît, Tressé, Meillac et autres paroïisses éloignées de près de quatre lieux de cette ville. Ils ont enlevé toutes les chemises qu’ils ont pu trouver et même d’autres linges et beaucoup d’habits, Les comandants ont requis les ouvriers de travailler, ont obligés les marchands de vendre, les ont payés en billets dits royaux qu’ils fabriquent et en ont peut-être distribué pour plus de quarente mille livres. Les dix sommes