Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...

Le GS

pieds, qu'il vaut mieux s'assurer de la propagation par la quantité. Nous diviserions alors la colonie entre Carlsruhe, Ettlingen et Rastatt.… » La lettre se termine par un jugement assez sévère sur le grand ouvrage de Necker, sur les finances, qui venait de paraître.’ « J’ai enfin lu très en entier et non sans peine, les trois tomes de messire Necker et je n'ai appris que très-peu de choses. Le livre en renferme beaucoup que je ne comprends point, mais Ce sera excellent pour être discuté dans une de nos heureuses campagnes. Je vais m’endormir présentement avec le Cultivateur américain* Toute ma maison vous salue et vous attend les bras ouverts...» Butré avait sans doute aussi visité plus d’une fois son ami, le marquis de Mirabeau, qui passait l'hiver à Paris. Nous

1 De l'administration des finances, par M. Necker, sans nom de lieu, 1784, 3 vol. 8. Défendu en France, le livre n’y fut pas moins vendu, dit-on, à 80,000 exemplaires. La raison pour laquelle Edelsheim et Butré parlent avec tant de dédain de ce grand travail de l’ancien ministre, c’est que Necker y combattait avec de bons arguments l'impôt unique sur le sol que réclamaient les physiocrates.

? Les Lettres d'un cultivateur américain, écrites à À. W. $., écuyer, depuis 1770 jusqu’en 1781, venaient de paraître à Paris, chez Cuchet, en 1784, en 2 vol. &. C’est un recueil de renseignements géographiques, économiques, politiques, sous forme épistolaire, entremêlés de récits et d'anecdotes sentimentales, dans le goût du jour. Il est dédié au marquis de Lafayette. Ce même ouvrage qui faisait bailler M. d'Edelsheim, inspirait par contre une admiration tout à fait exubérante à Butré. Après lavoir lu, il éprouva le besoin d’en exprimer ses sentiments au représentant de la république nouvelle, à Paris. C’était alors Thomas Jefferson, le futur président des Etats-Unis. Ce dernier dut sourire, je pense, en lisant dans la lettre du baron que ses compatriotes étaient «un grand peuple qui à pris ses lois naturelles dans le sillon de ses charrues, comme Yao Chum et Yu les y avaient prises à la Chine, il y a plus de quarante siècles, où elles subsistent encore et durent autant que les siècles. » Dans cette lettre il se caractérisait luimême comme «un chevalier français qui a consacré sa vie à défendre les droits des peuples envahis par tous les gouvernements. »