Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

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serait peut-être encore plus s’il était passé dans le Luxembourg, d’où il aurait eu peine à revenir.

Les renseignements qu’il a pris sur la route doivent servir à tous les non-conformistes, réfractaires, contrerévolutionnaires, aussi bien qu'à lui. La France a été frappée d’un coup électrique qui s’est fait sentir d’un bout du royaume à l’autre avec la rapidité la plus inconcevable. Partout la même énergie, le même ordre, les mêmes sentiments, la même attitude fière et inébranlable; la liberté est défendue par deux ou trois millions de baïonnettes, et la Constitution est environnée de milliers de bouches à feu qu’on appelait jadis rafio ullima regum, et qui sont aujourd’hui les meilleurs arguments du peuple. D’un bout à l’autre de la France, on s'est empressé d'envoyer à l'Assemblée nationale des adresses qui renferment les principes du droit public les plus fortement prononcés. Le corps diplomatique en Europe sera bientôt obligé de faire de nouvelles inquiétudes.

On est fort inquiet de M. Duveyrier (1); que ne doit-on pas craindre des lâches contre un honnête homme?

Je recevrai avec enthousiasme l'hommage nouveau que vous vous proposez de rendre à la Constitution: il sera digne de vos sentiments.

L’expulsion des prêtres fanatiques, et les preuves de l'impuissance des ennemis de la patrie, vont enfin rendre plus dociles ces femmes qui, de derrière leurs grilles, croient gouverner le monde.

Ilestétonnant [de voir|que toute la France étaitinstruite de la conjuration et du temps où elle devait s'effectuer et qu’on ne l'ait pas prévenue. L’exécution paraissait si absurde que ceux qui la savaient n’en croyaient rien, et les importants croyaient que, quelque chose qui arrivât, ils en tireraient avantage.

(1) Duveyrier avait été chargé d'aller notifier au prince de Bourbon-Condé le dégret qui lui ordonnait de rentrer en France sous quinzaine.